Ils n'avaient déjà pas obtenu la transformation du pont suspendu, et lorsque le projet de construction d'un pont en maçonnerie est retenu, les habitants de Valence et des Granges vont tenter d'obtenir le maintien du pont Seguin.
Le 11 octobre 1884 les droits de péage
du pont suspendu sont rachetés et la route reclassée en route
nationale. Le pont est ouvert à la libre circulation le 1er février
1885.
Or, le pont Seguin ne permettait pas le
passage de charges supérieures à 7000 kg, pour une voiture à deux
roues, et 10000 kg pour une voiture à quatre roues. Ainsi, en avril
1858, la Ville d'Avignon déplore que les propriétaires du pont
s'opposent au passage des blocs originaires des carrières de Crussol
et qui doivent servir de socle à la statue du Brave Crillon, et dont
l'inauguration est programmée pour le 3 mai suivant.
Statue du Brave Crillon - de Louis Veray - place
de l'Horloge vers 1887 - qui a bien été inaugurée le 3 mai 1858 - sur le site http://saint.memoire.free.fr/Chabrier
Mais pour la petite histoire, je n'ai pas trouvé comment le socle est parvenu à Avignon.
Dès 1891 le service des Ponts et
Chaussées de la Drôme présente un rapport pour la transformation
du pont suspendu en pont rigide, comme cela a déjà été effectué,
sur celui d'Avignon par exemple. Un projet soumis par Monsieur
Arnodin, évalué à 250 000 francs devrait permettre le passage de
plus lourdes charges et celui des tramways à traction de chevaux de
la ligne Valence – Saint Peray. Ce projet sera approuvé par la
Ville de Valence qui devrait participer à hauteur de 50000 francs,
comme le département de l'Ardèche ; et par le Conseil Général
de la Drôme qui lui serait impliqué à hauteur de 100 000 francs.
D'une délibération l'autre, entre les instances le projet reste
étudié pendant plusieurs années, alors que dès 1895 le Ministère
étudie en parallèle un projet de construction d'un nouveau pont.
C'est ce dernier projet qui aboutira au
choix, en 1900, d'un pont en maçonnerie, qui sera construit à moins
de 30 mètres du pont suspendu.
L'une des photographies exposées au Musée de Valence montre les deux ponts côte à côte, on voit bien qu'ils sont très proches.
Une pétition signée par les habitants
de Valence, et notamment ceux de la Basse Ville, est présentée au
Conseil Général de la Drôme en août 1903, puis au Ministère en
avril 1904. Elle demande le maintien du pont Seguin comme passerelle.
L'État
se désengage des coûts des dépenses liées au travaux de
réparation, des frais de gardiennage et d'entretien et maintient la
décision du 4 mars 1904 de détruire le pont suspendu.
Le
Conseil Général de la Drôme renouvelle sa demande de maintien en
août 1905, et Maurice Faure (*) proteste énergiquement contre « le
parti-pris de l'Administration supérieure qui refuse avec persistance
de donner satisfaction à la demande des habitants des Granges et des
Valentinois qui réclament, à bon droit, le maintien comme
passerelle du pont suspendu de Valence. L'Administration supérieure,
on peut l'affirmer, a compliqué systématiquement la question, pour
justifier sa résistance". Il cite l'exemple de la passerelle
provisoire construite à l'occasion de l'exposition universelle de
1900 que les riverains ont réussi à conserver, malgré la volonté
de l'Administration de la faire disparaître.
Le
24 août 1906, Maurice Faure demande au Conseil Général d'insister
pour qu'au moins l'arc central du pont suspendu soit conservé au
titre de monument historique. Le syndicat d'initiative de Lyon
s'associe à cette demande en 1907.
la pile telle qu'elle est représentée sous le pont Mistral par le collectif 7eSens - voir ICI
Mais
rien n'y fait, le Ministère tranche le 8 juin 1907 pour la
démolition du pont suspendu qui sera achevée en 1911 par l'enlèvement de la
pile.
Sources :
Archives
Départementales de la Drôme – 3S39/507 et 3S40/510 et 2458W1, projet de démolition du pont suspendu.
(*)
Maurice-Louis
Faure, né à
Saillans (Drôme) le 7 janvier 1850 et mort dans la même ville le 8
décembre 1919, est un homme politique français.
Député radical-socialiste de la Drôme de 1885 à 1902, puis
sénateur de la Drôme de 1902 à 1919, il fut président du Parti
radical de 1903 à 1904. Il fut Ministre de l'Instruction publique et
des beaux-arts du 3 novembre 1910 au 2 mars 1911 dans le gouvernement
Aristide Briand.
2 commentaires:
Déjà à cette époque le gouvernement ne tenait pas compte de l'avis des administrés. Et ça n'a malheureusement pas changé depuis :-((
Maintenant que le trafic fluvial se fait côté Villeneuve, je pense que si le changement de bras s'était fait plutôt, à Avignon il aurait été possible de conserver le pont suspendu. Mais l'administration aurait sans doute refusé d'en assumer les frais d'entretien et finalement, le pont d'Avignon aurait fini comme son frère de Valence. Dommage !
Pour ce qui est du pont suspendu d'Avignon, je ne vois pas ce que tu veux dire par "Dès 1891 le service des Ponts et Chaussées de la Drôme présente un rapport pour la transformation du pont suspendu en pont rigide, comme cela a déjà été effectué, sur celui d'Avignon". Le pont Daladier, qui a succédé au pont suspendu, ne date pas de la même époque, le projet initial de sa construction n'a été établi qu'en 1954...
Quoi qu'il en soit, merci pour cette intéressante documentation, texte et photographies, et pour la nostalgie !
J'ai lu que le pont suspendu d'Avignon devait être transformé, et non remplacé. L'a-t-il été ? Je n'ai pas vérifié, je le ferai dès que possible.
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